• Les complexes d'une grande actrice

    les complexes d'une grande actriceMais désorientée et naïve, Marilyn continue de se croire mauvaise comédienne malgré le succès de Bus Stop. Son travail sous la direction d’un Laurence Olivier peu inspiré et très exigeant dans Le Prince et la danseuse (où la rencontre symbolique de l’Amérique populaire et de la vieille Europe aristocratique dans un conte de fée moderne) n’arrange rien ; malgré tout, elle confirme qu’elle est bel et bien devenue une très grande actrice dans ce qui reste un très joli film. Le triomphe mondial de Certains l’aiment chaud, qui est certainement l’un des dix meilleures comédies que le cinéma hollywoodien ait jamais produite, la rassure un peu. Elle y livre comme la quintessence d’un génie érotique dont le critique et cinéaste surréaliste Ado Kyrou dira qu’il consistait en des défis « dont le plus important reste sa volonté de rester ce qu’elle était, d’oser être une femme, femme dans le moindre de ses gestes, dans ses paroles, dans son sourire, dans sa myopie, dans sa démarche ». Mais le tournage de ces deux films ne fut pas de tout repos pour ses partenaires et ne cesseront de se dégrader avec les acteurs et metteurs en scènes de ses prochains films. Ces derniers acceptaient mal des caprices qui étaient en réalité les prémices d’une névrose dont personne ne saura la guérir. Tony Curtis, son partenaire de Certains l’aiment chaud, ira même jusqu’à dire : « Embrasser Marilyn Monroe, c’était comme embrasser Hitler. » À quoi elle répondra avec beaucoup d’esprit : « Il a dit ça uniquement parce que mes robes étaient plus jolies que les siennes. » On se souvient bien sûr que, dans cette comédie débridée, chef-d’œuvre de la comédie américaine où Marilyn est au summum de sa beauté et de son talent, Tony Curtis et Jack Lemmon étaient travestis ! Depuis des années maintenant, Marilyn prend des cours à l’Actors’ Studio : son désir d’améliorer son jeu et de sortir des rôles de pulpeuse séductrice est pathétique et tourne à l’obsession. Elle croyait trouver dans son dernier mari, Arthur Miller, intellectuel de renom, une caution suffisante. Mais elle ne parient qu’à faire sourire ou jaser les milieux professionnels qui continuent stupidement à bouder son travail d’actrice. Le jury des Oscars semble ne voir en elle qu’une starlette comme une autre et, malgré une reconnaissance universelle par le public, qui fait de Marilyn la plus célèbre actrice de tous les temps, aucune récompense officielle ne vient la rassurer. Elle devient capricieuse, versatile, insupportable sur les plateaux, s’absente, boude les cocktails, arrive en retard systématiquement à tous ses rendez-vous avec la presse. Un examen plus sérieux des personnages qu’elle a incarné prouve que ses talents d’actrice, parfois mal employés, étaient réels. Derrière la simple poupée préfabriquée, derrière le visage d’ange aux yeux bleus, la silhouette de pin-up, il y avait une vraie comédienne. Il est sans doute vrai que sa vie privée tumultueuse, ses angoisses et ses complexes la rendirent difficile à diriger dans les dernières années de sa courte carrière. Elle était même menacée de licenciement à cause de son attitude sur le tournage de son dernier film, d’ailleurs inachevé (d’après la légende, Cukor lui-même perdait patience). Mais son interprétation pathétique dans Les Désaxés aux côtés de Clark Gable et de Montgomery Clift, lui aussi à la dérive, montre qu’avec un bon dialogue, et un bon réalisateur (John Huston en l’occurrence) elle pouvait faire de grandes choses. Ce fut son dernier film en fait.


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